La réelle souffrance des membres de l'entité ecclésiale dénommée « Archevêché des églises orthodoxes russes en Europe occidentale – exarchat du patriarche de Constantinople » transparaît maintenant dans toutes ses parties. Elle se lit sur les sites internet, dans les blogs, s'entend dans les conversations, et s'exprime dans les rumeurs. Et tout le monde semble désemparé et désespéré par la situation qui s'est établie.
Sans doute faut-il, dès lors, se poser la question du destin de cette entité ecclésiale.
Au début de son existence, son rôle était clair. Il s'agissait de permettre aux nombreux réfugiés russes, chassés de leur pays par la révolution bolchevique, de maintenir une vie religieuse conforme à leur foi.
Nous ne reviendrons pas, ici, sur les évènements tragiques qui obligèrent ce diocèse à se mettre provisoirement sous la protection du Patriarcat de Constantinople. Mais ses membres et ses évêques dirigeants savaient qu'ils étaient une partie de l'Eglise russe, même s'ils étaient empêchés de vivre normalement cette appartenance.
Mais voilà que les obstacles objectifs aux relations avec le Patriarcat de Moscou disparaissent.
Néanmoins, une nouvelle génération de membres de l'Archevêché a développé des théories séduisantes, mais non enracinées dans l'Eglise réelle. Aux yeux de cette génération, par exemple, le Patriarcat de Moscou, qu'elle connaît très mal, est entaché de tares, sans doute héritées de ses persécuteurs, qui empêchent même d'envisager une normalisation de la situation de ce diocèse par retour à l'Eglise à laquelle il appartient.
Il en résulte que l'Archevêché cherche sa voie et il faut bien le constater, il ne la trouve point.
Est-ce le début de l'Eglise locale tant espérée par les membres de l'Archevêché qui ont développé de telles théories ? Mais l'Eglise locale est l'affaire de tous les orthodoxes d'un lieu, et non pas d'un tout petit groupe.
Est-ce le diocèse des orthodoxes de tradition russe de nos pays en rupture avec le Patriarcat de Moscou pour une raison ou pour une autre ? Ce serait admettre une nouvelle voie de divisions dans l'orthodoxie si chaque Eglise traditionnelle pouvait créer des diocèses nationaux pour les fidèles mécontents de leur hiérarchie.
Est-ce un diocèse qui chercherait à regrouper des émigrés de l'Ukraine actuelle ? Mais ce serait un mandat nouveau tout à fait étranger aux racines de cette entité.
Est-ce un modèle universel d'organisation d'un diocèse orthodoxe qu'il faudrait préserver à tout prix ? Les dissensions internes qui s'y manifestent peuvent en faire douter.
Ces dissensions sont, du reste, si fortes qu'elles commencent à se voir de l'extérieur et qu'elles risquent de porter atteinte à l'image de l'orthodoxie dans nos pays, que, naguère, ce diocèse avait contribué à faire connaître et apprécier dans le monde non-orthodoxe.
Lorsque l'on considère la vie paisible de la Métropole de France du Patriarcat de Constantinople ou celle non moins paisible de l'Archevêché de Chersonèse du Patriarcat de Moscou, on ne peut qu'être frappé par les tribulations de cette entité ecclésiale qui tient un peu des deux.
Cette situation déplorable interpelle tous les orthodoxes dans nos contrées, y compris l'Assemblée des évêques. Il serait souhaitable que s'élabore une solution de paix qui ne heurte personne, mais qui soit de nature à ramener le calme parmi nous.
Séraphin Rehbinder
Président de l'OLTR
2 Juillet 2015